Exposition Olga Dupont / 2007

 

 

LE  BESTIAIRE D’OLGA DUPONT

Pour sa dernière exposition « professionnelle » de la saison, Le centre d’art de Montrelais, par l’intermédiaire de son programmateur Claude Colas, a invité l’artiste OLGA DUPONT qui nous plonge dans son bestiaire coloré. Elle nous dit peindre depuis toujours mais c’est depuis sa sortie des Beaux-Arts en 1994, qu’elle s’est vraiment attelée à une démarche professionnelle. Comme tous les artistes, elle est fascinée par l’œuvre d’autres peintres. Ainsi, « La Chasse au Tigre » de Delacroix va-t-elle inspirer les deux tableaux que vous verrez en haut dans la troisième salle. En choisissant « l’Animal » comme fil conducteur de son œuvre, Olga Dupont, qui peint peu de figures humaines, va jouer ainsi, par projection, sur l’animalité qui est en nous, et, réciproquement, l’humanité qui est en chaque animal. Pour preuve, le babouin de la première salle du haut dont le pied et le bras semblent être ceux d’un homme, ou la femelle  chimpanzé dans la même salle qui pose avec son petit en une maternité presque classique.

L’animal est peu traité par les artistes contemporains car il est victime de ses représentations très réalistes passées. Olga Dupont, sait se détacher de la stricte réalité pour que l’animal apparaisse comme un nouveau support de peinture, où les lignes de force, le mouvement, les couleurs, les motifs de la fourrure, s’allient en lignes puissantes avec les aplats des sols et des cieux. Oui, il y a de la représentation mais l’inspiration est ailleurs. Ce n’est pas pour rien qu’Olga Dupont choisit plutôt dans cette série des animaux exotiques. Là-bas, dans leur milieu naturel, c’est la loi du plus fort et du plus rapide. L’animal ne vit pas, il survit. Les prédateurs sont là, en attente. Et même eux, sont en danger. Comme nous l’avons vu, le tigre chasseur peut lui-même se faire chasser par l’homme, le super prédateur ! La course, la fuite, l’affrontement, la mort enfin source de vie pour l’autre… C’est le cycle éternel de la nature. Et l’animal en est au plus près. D’ailleurs, il porte sur lui la couleur et le motif qui va tromper. Les rayures du tigre lui permettent de se confondre avec les ombres des bambous. Les taches de la panthère jouent sur les ombres des feuilles, la robe de l’antilope épouse les teintes du sable. L’éléphant émerge comme un rocher. Le gorille, bien que noir, absorbe le vert de la jungle. Donc, l’antilope fuit le guépard, le zèbre succombe à la panthère, les gazelles qui boivent dans le couloir, surveillent du coin de l’œil la venue du danger. Si les tigres sont allongés, ils ne se reposent pas, ils guettent. Le seul tableau de la salle du milieu au premier étage est symptomatique de la réception que l’on peut en avoir. On peut rester dans une lecture ordinaire, comme le public qui admirait les tigres de Delacroix ou les bronzes de Barye et « voir » les panthères qui attaquent l’antilope, mais on peut aussi dépasser cette lecture en s’enfonçant dans cette masse ocelée aux couleurs chatoyantes.

Olga Dupont travaille principalement à la gouache. «  La gouache, nous dit-elle, est une technique pour beaucoup mise de côté, peu noble, réservée aux enfants. Alors qu’elle est riche d’effets plastiques et de nuances colorées. Elle est à domestiquer.»

La gouache qui se travaille à l’eau est certainement un médium délaissé par les artistes. Retrouver cette fraîcheur nous permet de revenir à nos amours d’enfance, lorsque nous peignons sur nos tables d’écolier pendant la séance « de dessin ». Est-ce possible de faire de si grands formats avec nos petits pinceaux ? Oui ! Reine de la couleur et du mouvement, Olga Dupont poursuit donc cette inspiration orientaliste et furieusement romantique de Delacroix. Pourtant, l’interprétation qu’elle nous donne, nous prévient que cet univers lumineux et chatoyant est un univers à la lisière de notre jungle intérieure où le danger rôde, prêt à bondir.

Michel Amelin